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Un bénévole pour la mission de Kerpape

Publié le 23 janvier 2024

Expérience Kerpape 2022 -2023

Comment j’en suis venue à être bénévole à l’aumônerie catholique de Kerpape ?

Alors que je venais de rencontrer Frère Philippe-Néri il m’a proposé de rejoindre son équipe à l’aumônerie de Kerpape. Etonnée, j’ai dit : « je veux bien essayer ».

Au cours des deux premiers mois où je faisais les visites en binôme avec Frère Philippe-Néri, j’ai pris la mesure des combats que chaque résident livre face à son corps abimé, fragile. 

Comment cela se passe ? On frappe à la porte, on se présente, on propose de venir les visiter le temps de leur séjour. S’il y a refus, on remercie la personne de nous avoir reçu et on note de ne pas repasser pour ne pas la déranger. On invite les croyants à venir à la messe du jeudi et souvent on prie avec eux.

 Semaine après semaine et au fil du temps, souvent mois après mois, voire année, on suit l’évolution, on les félicite des progrès, on les encourage.

Mais l’important c’est d’être là régulièrement, nous ne sommes ni la famille, ni les soignants, mais une présence bienveillante, une récréation pour les incroyants et pour les croyants une place privilégiée qui permet une grande liberté dans l’échange. De faire partie de l’aumônerie, si parfois cela ferme des portes, d’autres s’ouvrent dans une confiance réciproque où visite après visite les cœurs se libèrent du poids de la souffrance souvent cachée aux proches.

Ceux qui ont la foi nous attendent jeudi après jeudi, aussi je les préviens de mes absences, et si les visites sont chargées, je passe simplement dire bonjour. Si, en apparence mon activité peut paraître dérisoire : parcourir les couloirs, frapper aux portes des chambres, aller-venir, repasser à un autre horaire, en fait, derrière ces allées-venues ce sont des rencontres où l’on partage des moments particuliers dans une grande liberté d’échange.

Venant de Paris, je connaissais Kerpape de réputation mais j’y ai découvert un formidable lieu de vie, chaleureux, avec des « résidents » plein d’humour et chose étonnante ne se considérant pas comme malade mais dans un nouvel état à apprivoiser. Ils sont passés à côté du pire, c’est-à-dire de la mort, mais ils sont là, alors tout va bien. Etonnamment, oui tout va bien, même si on a une jambe en moins ou deux, même si on ne communique que par signe, même si … c’est dur, difficile. A Kerpape on est actif, on bosse toute la journée pour remettre son corps en marche, actif pour sortir dans un meilleur état qu’à l’arrivée.

Aujourd’hui, après plus d’un an de visite à Kerpape, ce sont des leçons de patience, de volonté que je reçois à chaque visite. Le corps se dérobe mais l’esprit est là actif, réceptif.  Des femmes et des hommes se battent pour faire refonctionner leur corps, accepter leur nouvelle situation physique, apprendre à vivre avec. Ils déplacent des montagnes, gagne des batailles …chaque journée passée à Kerpape, me fait prendre conscience des ressources que chacun possède. Ici toutes les forces, physiques, morales, spirituelles sont exploitées pour s’en sortir au mieux. Créer un lien avec ceux qui ne peuvent s’exprimer par la parole, c’est me mettre à l’écoute de leur cœur, c’est aussi ouvrir le mien et là le Seigneur fait son œuvre. Nous sommes trois : Lui, la personne visitée et moi, alors le Seigneur anime ma présence, ma voix, mon sourire, Il est le geste envers ce corps abimé et je m’étonne de ce qu’Il me donne de vivre.

Être bénévole à Kerpape c’est accepter de voir son cœur se dilater, d’être troublée par le mystère de la vie. La vie s’exprime par de multiples moyens, aucun n’est supérieur à l’autre. Ici, l’on prend conscience des ressources que chacun possède ; toutes les forces, physiques, morales, spirituelles sont exploitées pour s’en sortir au mieux.

Régulièrement nous reprenons les visites en binôme, c’est important de se replacer dans le cadre de l’aumônerie. 

La messe du jeudi, ou en cas d’absence du prêtre une célébration de la parole, est un espace important dans ces journées. Elle est le rendez-vous des croyants, de ceux qui se reposent en Dieu, qui malgré leur situation ont gardé confiance en la vie, en leur vie. C’est aussi un temps d’échange où la parole de Dieu est libératrice et où chacun fait part de ses espoirs et du chemin qui est encore à parcourir. Chemin physique, oui, mais chemin spirituel avant tout. Chaque semaine on fait communauté et ce temps est comme un jardin secret, alors que tout leur quotidien se déroule sous le regard des soignants, là, seul le regard du Seigneur les rejoint et ils peuvent s’y abandonner.

célébration de la messe au foyer RM

Après chaque journée je note le contenu des visites, à la fois pour bien suivre les évolutions de chacun afin qu’à la prochaine visite on reprenne où l’on en était et aussi être attentive aux progrès : c’est important de ne pas encourager dans l’abstrait, mais de remarquer qu’aujourd’hui, waouh ! les doigts bougent de 3 cm !

Au-delà du suivi, ces notes sont importantes ; elles permettent de me décharger de tout ce que j’ai recueilli, de partager les rencontres avec Frère Philippe-Néri et ainsi de ne pas être seule face à ce que j’ai vécu.

Participer à l’aumônerie de Kerpape est une aventure humaine et spirituelle. Une aventure qui dilate le cœur et réjouit l’âme et si après une journée à Kerpape, je rentre épuisée, curieusement j’ai le sourire aux lèvres, et mon âme est rassasiée. En résumé, l’expérience de Kerpape me dilate le cœur.

Marie-José septembre 2023